Tunisie: l’hémorragie des cerveaux.

L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a, dans un rapport publié en novembre 2017, fait état du départ volontaire de 95 000 jeunes cadres tunisiens depuis la chute du régime de l’ancien président Ben Ali, en janvier 2011, pour faire leur vie ailleurs, dont 84 % en Europe.

Un chiffre annoncé, ces derniers jours, par l’Union des professeurs universitaires chercheurs tunisiens fait froid au dos. Près de 4 000 enseignants universitaires ont quitté la Tunisie pour entamer leur vie professionnelle ailleurs, en raison notamment, de la situation du pays confronté à une crise économique et sociale aiguë et à l’incapacité des gouvernements successifs à juguler le chômage des jeunes diplômés qui frôle les 30%. Auparavant, le conseil de l’ordre des ingénieurs a révélé que 2 500 ingénieurs sont partis en Europe et celui des médecins a annoncé le départ de plus de 3 000 blouses blanches. Des statistiques qui corroborent celles de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) qui, dans un rapport publié en novembre 2017, a fait état du départ volontaire de 95 000 jeunes cadres tunisiens depuis la chute du régime de l’ancien président Ben Ali, en janvier 2011, pour faire leur vie ailleurs, dont 84 % en Europe. Il s’agit principalement, selon le même rapport, de « diplômés de haut niveau tentés par des perspectives d’avenir plus prometteuses que celles que leur propose la Tunisie ».

La France et l’Allemagne demeurent les pays les plus attractifs pour ces jeunes cerveaux, notamment parmi les ingénieurs en informatique, les médecins et les enseignants-chercheurs. Pour les universitaires qui se prévalent d’une bonne expérience, ce sont les pays du Golfe et en premier lieu l’Arabie Saoudite qui les attirent le plus en raison des salaires bien plus intéressants que ceux offerts par les universités tunisiennes et des conditions de travail, de loin meilleures, avec moins de grèves et de mouvements de protestation.

Les autorités tunisiennes minimisent ce phénomène et préfèrent, comme c’est le cas du ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique, parler de « mobilité des compétences », ou encore son collègue des affaires sociales qui pense que « les compétences peuvent devenir un pont entre la Tunisie et les pays où elles résident » et qu’ils « peuvent représenter leur pays à l’étranger et contribuer à l’économie nationale ». Mais en réalitéil constitue un vrai problème pour un pays qui peine à assurer sa transition économique. Il devient encore plus inquiétant quand on sait que la plupart de ces jeunes cerveaux, plus de 50%, rechignent à rentrer au pays.

A ce phénomène s’ajoute un autre non moins inquiétant, celui de la migration des étudiants. Les bureaux de migration régulière vers des pays comme la France, l’Allemagne ou encore le Canada et les pays de l’Est comme la Russie et l’Ukraine connaissent une forte demande de la part de jeunes bacheliers. Tout comme « Campus France » qui reçoit les demandes de préinscription à partir du mois de janvier de chaque année. Les raisons souvent invoquées ont un rapport avec l’éternel problème du système d’accès à l’enseignement supérieur en Tunisie et à la qualité du système d’enseignement à l’étranger. Leur nombre va croissant et il est estimé à plus de 70 000. Mais c’est l’Hexagone qui demeure l’attraction la plus prisée où 12 390 jeunes tunisiens sont inscrits dans les différentes institutions universitaires, soit 3.8% de l’ensemble des étudiants étrangers. Ils arrivent en quatrième position derrière les Marocains (38 002), les Algériens (26 116) et les Chinois (28 760), selon les statistiques fournies par « Campus France » en Tunisie. La France constitue, en effet, pour beaucoup de jeunes maghrébins, un choix « naturel » compte tenu des liens historiques, culturels et politiques, selon une étude monographique menée conjointement par l’Observatoire français de la vie étudiante(OVE) et l’Observatoire tunisien de la jeunesse(ONJ) en 2009, sur « les étudiants tunisiens en France ».

Ces étudiants sont de moins en moins enclins à envisager un retour en Tunisie.  Selon des études menées, un peu plus de la moitié d’entre eux, (55%), préfèrent rester dans les pays d’accueil, en fonction de « leur légitime intérêt personnel » et ce, bien qu’ils demeurent attachés à leur pays et n’excluent pas totalement l’éventualité du retour qu’ils conditionnent essentiellement par les perspectives que leur offre leur Pays. Des perspectives qui, pour le moment, son confuses.

Brahim Oueslati

1 Commentaire

  1. Ils vont vers le mieux être.
    ils vont vers les milieux dont ils vont compter en termes de valeurs.
    Il s’agit pour eux de mettre leurs compétences aux services d’une bonne amélioration des conditions de travail et de vie.

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