Anonymat…

Le style de l’écriture, la référence à tel événement ou tel individu : tout est disséqué par l’administration Trump pour tenter de confondre celui qui aurait rédigé cette tribune incendiaire. Suspicions, délations et conspirations, tous les ingrédients d’un bon polar, ça va « décoiffer »…

Monsieur Donald Trump n’est pas vraiment mon modèle d’homme politique. Il l’est si peu que j’ai tendance à me réjouir à chaque fois qu’il a des ennuis. Je n’ai pas encore lu le livre que Bob Woodward, le tombeur de Richard Nixon, vient de consacrer aux travers et autres turpitudes de ce peu sympathique président, mais les extraits disponibles dans la presse et sur le net m’ont déjà permis d’espérer que de telles révélations allaient contribuer à lui faire perdre les élections de mi-mandat.

Alors, quand dans la même semaine un « haut responsable » de la propre administration de Trump se permet de le fustiger dans les colonnes du New York Times, je devrais bondir de joie. En réalité, ce n’est pas le cas. Pas du tout. En effet, l’article en question n’est pas signé. Et c’est un manque majeur !

Face à toutes les « fake news » qui se propagent sur les réseaux sociaux ou par courriels, la presse écrite a un avantage unique: on sait qui transmet la nouvelle. Les articles ont un auteur. Ils sont signés. Pour moi, ne pas respecter la règle est grave.

James Dao, le directeur des pages opinion du NYT se défend : « Dès les premiers contacts il était clair que l’auteur souhaitait rester anonyme, mais nous n’avons conclu aucun accord avant d’avoir lu l’article et avant d’avoir la certitude que l’auteur était bien celui qu’il disait être. » C’est bien le moins ! Dao poursuit : « Nous estimons que publier ce texte de manière anonyme est la seule façon de livrer un point de vue important à nos lecteurs ». L’argument n’est pas sans valeur : un journal a le devoir d’informer. Quand il connait un fait important il se doit d’en informer ses lecteurs.

Problème : en lisant l’intégralité du texte on s’aperçoit qu’il n’y a guère de faits originaux signalés. « La racine du problème, c’est l’amoralité du président » : ce n’est pas un fait particulièrement nouveau ! « Il est absolument impossible de prévoir s’il va changer d’avis » : cela vaudrait pourtant mieux que de le voir persévérer dans l’erreur ! Dans tout l’article il n’y a qu’une seule critique concrète : « Le président était réticent à l’idée d’expulser un si grand nombre d’espions russes, en représailles à l’empoisonnement en Grande Bretagne d’un ancien agent secret russe ». Un président a bien le droit de ne pas être pleinement convaincu par les preuves apportées par son administration. Bref, l’article est franchement peu intéressant. Aurait-il été publié s’il n’y avait pas l’attrait du mystère ? On peut en douter.

Que penser de l’auteur ? A-t-il été payé par le NYT ? L’histoire ne le dit pas. Si c’était le cas il y aurait au moins une explication à son acte. Sinon que cherche-t-il ? Simplement faire mal à un président qu’il n’aime pas ? Essayer d’entrer dans l’histoire comme « Deep Throat » l’indicateur du Watergate ? Une seule chose est certaine : il ne veut pas perdre sa place. Normal, mais pas très glorieux.

Qui est la taupe ? Qui est le traître ? Au sein du cabinet de Trump l’atmosphère n’est pas gaie. Chacun soupçonne. Chacun se sent soupçonné. Donald Trump enrage. Tant mieux puisqu’il le mérite.

Tant pis car la Terre n’a pas besoin d’un enragé à la tête du plus puissant de ses Etats.

Etienne Copel.

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