Au mois de septembre 2018, les immatriculations de voitures neuves ont baissé de 12,8 % en France. Un chiffre impressionnant, mais qui n’est rien à côté du score européen : – 23,5 %…Des chiffres symptomatiques d’un monde en pleine mutation ?
Bien sûr, les spécialistes souligneront qu’il faut relativiser, qu’immatriculation ne rime pas avec ventes, que certains facteurs ponctuels ou saisonniers peuvent expliquer ce trou d’air. Il n’empêche : l’industrie automobile traditionnelle ne se porte pas bien. En témoigne la nervosité des marchés financiers, sur lesquels la plupart des grands groupes européens cotés voient leurs actions stagner à un niveau historiquement faible. Le secteur automobile inquiète, et certains se demandent s’il ne voit pas approcher son « moment iPhone ».
Explication : l’expression « moment iPhone » fait évidemment référence à la téléphonie mobile, secteur longtemps archi-dominé par le trio Nokia/Motorola/Ericsson. Lorsqu’Apple a annoncé le futur lancement de son premier iPhone, les poids lourds du secteur se sont gaussés. La téléphonie, disaient-ils, ça ne s’improvise pas. On a vu le résultat. Aujourd’hui, Apple fait partie du top trois mondial du secteur. Quant à Nokia, Motorola et Ericsson, ils ont à peu près disparu du paysage, du moins comme fabricants de téléphones. Et pourtant, l’iPhone n’apportait pas de progression spectaculaire dans un domaine – téléphonie, multimédia mobile, design, ergonomie… – particulier. Il offrait simplement un package complet, proposant à peu près ce qui se faisait de mieux dans ces différents domaines.
Ce que les experts qui dressent un parallèle entre télécoms et automobile veulent dire, c’est qu’aujourd’hui les attentes des consommateurs de voitures ont changé. Le véhicule a perdu, en partie, son côté statutaire. L’idée du partage, du covoiturage, de la location courte ou longue durée s’est installée. Les performances purent séduisent moins – où peut-on encore rouler vite ? – d’autant qu’elles riment avec consommation et émissions polluantes. Par contre, les jeunes consommateurs s’intéressent à la connectivité du véhicule, aux fonctions multimédia embarquées, voire à ses capacités de pilotage autonome. Et là, c’est clairement plus vers Tesla que vers BMW ou Volkswagen qu’il faut se tourner.
Les grandes métropoles se ferment de plus en plus aux moteurs à combustion – en France, on parle d’interdire totalement le Grand Paris aux diesels en 2024, aux véhicules à essence en 2030 – et les normes en matière d’émissions sont de plus en plus sévères. Bref, l’industrie automobile actuelle semble bien avoir son avenir derrière elle. Bien sûr, les grands constructeurs, allemands notamment, avancent à grands pas vers l’électrique. Mais malgré leur bonne volonté, la Chine est déjà loin devant, et contrôle la majorité du marché mondial des batteries. Que deviendront les sous-traitants européen qui fabriquent des pièces mécaniques si le marché bascule vers le tout-électrique ?
Actuellement, si les grands constructeurs européens développent des gammes hybrides et électriques, c’est avant tout pour respecter les quotas que leur imposent les politiques. Tesla et les constructeurs chinois, eux, le font parce qu’ils croient à un monde sans carburants fossiles et veulent accélérer la transition. Autant dire que le match n’en est pas vraiment un.
Olivier Marbot
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