« C’est la fin d’un tabou politique, l’aboutissement d’une dynamique lancée il y a une dizaine d’années au plus haut niveau de l’État», estime le sociologue estime le sociologue Khaled Mouna.
Pays leader mondial dans la production de cannabis, le Maroc a adopté jeudi un projet de loi autorisant un usage « médical, cosmétique et industriel » du cannabis, ouvrant la voie à la légalisation de son usage thérapeutique sur son territoire.
Le cannabis dit « récréatif », reste, lui, toujours prohibé.
Le but est de « reconvertir les cultures illicites destructrices de l’environnement en activités légales durables et génératrices de valeur et d’emploi », selon le texte.Les professionnels du cannabis médicalisé visent le marché européen : les professionnels estiment à 1 milliard de dollars (840 millions d’euros) le potentiel de ce cannabis légal en Europe. Mais les Américains ont aussi le regard tourné vers le cannabis marocain. Plusieurs groupes ont envoyé des équipes pour prospecter et rencontrer les cultivateurs de cannabis. Ils espèrent vite passer des accords « stratégiques ».
Le « kif » fait vivre entre 80 000 et 120 000 familles, selon les estimations au Maroc. Les petits cultivateurs qui touchaient « 4 % du chiffre d’affaires final dans le circuit illégal », seulement, contre potentiellement « 12 % dans le marché légal », devraient profiter de cette nouvelle manne.
Selon une étude publiée en 2020 par le réseau indépendant « Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée », cette culture s’élèverait à plus de 700 tonnes par an, pour une valeur de 23 milliards de dollars (environ 19,2 milliards d’euros).
Les producteurs devront se conformer aux conditions imposées par le cahier des charges prévu par le projet de loi, notamment celui relatif au tétrahydrocannabinol (THC) et renoncer à la plante actuelle pour la remplacer avec une nouvelle dont le THC ne dépasse pas les 0,2%, normes imposées par l’ONU.
D’autres pays devraient vite embrayer le pas et intensifier cette production de cannabis. . La concurrence sera vive.
L’Algérie, avec laquelle les relations diplomatiques sont très tendues en ce moment, s’alarment, cependant, de la dangerosité du « cannabis marocain » dont un officier de la gendarmerie algérienne n’a pas hésité à affirmer que le produit est « comparable à la cocaïne ou l’héroïne et présente par conséquent un risque sanitaire énorme.« . Et ce même officier d’alerter : « On a vu son industrie au Maroc se transformer par l’introduction massive de variétés hybrides, à haut rendement, ce qui a permis d’augmenter la production et d’augmenter la puissance du haschich.»
Au Maroc, le projet de loi ne fait pas l’unanimité au sein du parti Justice et Développement (PJD, islamiste) qui dirige la coalition gouvernementale. L’ancien chef du PJD, Abdelilah Benkirane, figure politique emblématique, a annoncé le « gel de son adhésion » dans une lettre manuscrite postée sur facebook. L’examen prochain de ce texte qui doit être prochainement validé par le Parlement suscitera encore de nombreux débats.
N.P
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