Cette théorie du complot est très répandue dans le vocabulaire des politiques tunisiens. Elle alimente les débats sur les réseaux sociaux et dans les médias avec la contribution des polémistes, journalistes et animateurs de radio et télévision.
La Tunisie vit ces derniers temps au rythme du « complotisme » et du « conspirationnisme », véhiculés par des politiques en manque d’inspiration, mais qui nourrissent une paranoïa quasi générale dans les rangs des Tunisiens. Le nouveau secrétaire général du parti présidentiel, Nidaa Tounes (Appel de Tunisie), Slim Riahi a déclaré avoir découvert un complot contre l’Etat et affirme en détenir les preuves. Ce complot présumé est, selon lui, fomenté par le chef du gouvernement, le premier responsable de la sécurité présidentielle, l’ancien directeur du cabinet présidentiel et un ancien ministre. Il a annoncé avoir saisi le tribunal militaire qui a ouvert une enquête préliminaire. Ses déclarations dans un média étranger, France 24, sont venues jeter un pavé de plus dans l’insondable marigot politique tunisien. Riahi, actuellement à l’étranger, qui a été élevé, contre toute attente, au premier poste de responsabilité au sein de Nidaa Tounes, n’est pas aussi hurluberlu qu’on le pense. Il a bien choisi le moment, le lieu et le média pour faire sa déposition comme témoin. C’est à la suite de la grève générale dans la fonction publique organisée le 22 novembre dernier à l’appel de la centrale syndicale et à la veille des débats budgétaires, à Paris et sur la chaine France 24. Tout comme il a bien ciblé les personnalités qu’il accuse d’être impliquées dans cette conspiration. Histoire de donner à ses déclarations l’écho escompté, puisqu’elles ont été largement reprises par des médias nationaux et étrangers et ont alimenté les débats en Tunisie.
D’autres complots non encore élucidés !
Ce complot présumé s’ajoute à d’autres qui restent encore non élucidés. Il y a cinq ans déjà, l’ancien président provisoire Moncef Marzouki avait dénoncé dans une interview accordée au journal le Monde du 7 novembre 2013, « un complot des partisans de l’ancien régime de Ben Ali, de puissances arabes et des salafistes (sic) visant de faire avorter le processus démocratique et à déstabiliser la Tunisie ». Un complot qu’il aurait fait avorter en sa qualité de chef suprême des armées !
Actuellement, un ancien ministre de l’intérieur, en fuite, est accusé avec deux anciens hauts cadres des renseignements, aujourd’hui sous les verrous, de complot contre la sureté de l’Etat. L’un de ses successeurs à la tête du ministère, Lotfi Brahem, a été, à son tour, accusé par un média étranger de fomenter un coup d’état et il a déposé plainte, à Paris, contre le journaliste français qui a fait cette révélation.
Cette théorie du complot est ainsi très répandue dans le vocabulaire des politiques tunisiens. Elle alimente les débats sur les réseaux sociaux et dans les médias avec la contribution des polémistes, journalistes et animateurs de radio et télévision. Au point qu’elle se trouve banalisée et décrédibilise ses auteurs. Mais elle pourrait semer la paranoïa et la peur chez les citoyens et écorner l’image du pays à l’étranger. Fragiliser ses institutions et remettre en question le processus démocratique en cours.
Car, comme le disait le philosophe et poète français Paul Valery ( 1871-1945), « le mélange de vrai et de faux est énormément plus toxique que le faux pur. »
Brahim Oueslati.
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