En Tunisie, des chercheurs du Groupe Tawhida Ben Cheikh (GTBC) ont lancé une enquête sur la santé et les pratiques sexuelles des jeunes de 15 à 24 ans, résidents dans le Grand Tunis dont deux zones en quartiers défavorisés. Les résultats de cette étude en cours sont pour le moins inattendus.
Alors que la révolution aurait pu laisser croire à l’émergence d’une génération libre et sans tabous, la réalité du terrain atteste du contraire. Les dernières mutations politiques et socioéconomiques s’accompagnent de comportements sexuels de plus en plus à risque. Les mentalités ont régressé et les réactions stigmatisantes à l’égard des filles célibataires sexuellement actives n’ont rien perdu de leur force. Ajoutez à cela le manque d’éducation sexuelle, le relâchement ou l’absence des institutions de l’Etat quant à une politique structurée et une approche globale de la question.
Une précédente enquête nationale effectuée auprès jeunes de 15 à 24 ans, a déjà révélé que 26,4 % des interrogés des deux sexes ne connaissent pas les infections sexuelles transmissibles ; seul 1.6 % d’entre eux déclarent avoir eu recours à un test de dépistage du VIH, et 82 % d’actifs sexuellement affirment ne pas avoir utilisé de préservatifs lors du premier rapport. L’enquête du Groupe Tawhida confirme cet état des choses et ajoute que 23,1 % des 15-16 ans et 6,2 % des 23-24 ans n’ont aucune idée des méthodes de contraception. Si la pilule est assez bien connue chez les filles, plus de 60 % d’entre elles n’ont jamais entendu parler de la pilule du lendemain.
Malgré le fait que la gratuité des services publics reliés au planning familial soit prévue par la législation et que la Tunisie dispose des moyens les plus modernes en la matière, l’enquête révèle le peu de connaissance des services en charge de la régulation des naissances.En effet, à la question « Est ce que l’avortement est gratuit dans les hôpitaux et cliniques du planning familial ? », 80 % des filles et garçons confondus répondent soit « non », soit « je ne sais pas ». Pire, dans un pays qui a légalisé l’interruption volontaire de grossesse en 1973 et figure comme un modèle du genre, près de 50 % des jeunes ignorent que l’avortement est légal, ou pensent qu’il est haram (illicite).
Le taux de jeunes ayant assisté à des cours sur la sexualité est de 0, 4 % uniquement. En cause, la quasi-inexistence d’un tel enseignement dans les écoles et l’absence de prestataires de services de santé appropriés. Dans 70 % des cas, l’information relève de sources non structurées : amis, parents, expérience personnelle ou Internet. Enfin, à la question « Avez vous déjà eu une/des relations sexuelles ? » 63.1% des garçons et 21.1 % des filles répondent positivement ».
Fawzia Zouari.
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