“Il convient de cesser dès maintenant tout nouveau projet d’exploration gazier ou pétrolier“.
Fatih Birol, 63 ans, est le directeur exécutif de l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Il vient de présenter la roadmap 2050 pour parvenir à la neutralité carbone. Il en est convaincu, il faudra « dès maintenant » oublier tout projet d’exploration pétrolière et gazière, ne plus vendre de voitures thermiques neuves au-delà de 2035. Le solaire deviendra la première source d’énergie dans le monde.
D’ici 2030, il convient donc de mettre en place 4 fois plus d’installations photovoltaïques ou éoliennes. 90% de l’électricité devra venir des renouvelables en 2050.
Comme Fatih Birol le rapporte à Challenge, «On a commencé notre travail il y a huit mois à la demande de la présidence de la COP 26. Une cinquantaine de nos économistes, analystes, statisticiens, spécialistes en modélisation y ont participé. Le résultat est décoiffant. Le monde de 2050, version AIE, n’aura plus rien à voir avec celui de 2021. La production de pétrole aura chuté de 75 %, celle du charbon de 90 %, la demande globale en énergie aura baissé de 8 % alors que la population aura crû de 2 milliards d’habitants. Les ressources fossiles ne fourniront plus qu’un cinquième de l’énergie pour des usages comme les plastiques (quatre cinquième actuellement). Dans le même temps, la part des renouvelables aura été multipliée par huit et représentera 90 % du mix électrique, les 10 % restants étant dévolus au nucléaire.«
Et de poursuivre avec la même conviction et le même enthousiasme : « Il y a aujourd’hui un consensus politique, assure-t-il. Limiter le réchauffement à 1,5 degré est peut-être le plus grand défi que l’humanité ait à relever. Le chemin est étroit mais encore praticable. Il y a un fossé croissant entre la rhétorique climatique des gouvernements et des industriels et la réalité. Il faut faire comprendre aux acteurs financiers qu’ils gagneront de l’argent en investissant dans les énergies propres et qu’ils prendront de très gros risques en accompagnant des projets fossiles.«
Fatih Birol souligne le changement de stratégie des pétroliers, principa lement européens. «Leurs investissements dans les renouvelables sont modestes mais réels, dit-il. Grâce à leur expertise dans les plateformes offshore, les compagnies pétrolières sont bien placées pour capter le marché de l’éolien en mer.»
Fatih Birol attend avec impatience la prochaine Cop-2026 qui doit avoir lieu à Glasgow en novembre prochain : «Après le coronavirus, certains pensaient que les gens allaient devenir raisonnables et se désintoxiquer des énergies fossiles. Ça ne se passe pas comme ça. Il aurait fallu des signaux des gouvernements incitant à moins consommer. Comme ils ne sont pas venus, on est revenu à la situation d’avant le Covid. Mais à Paris, les engagements des Etats n’étaient pas juridiquement contraignants. J’ai bon espoir qu’ils le soient à Glasgow.
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