Membre du comité éditorial de la Revue pour l’Intelligence du Monde, le général Etienne Copel donne son point de vue sur la tribune publiée dans Valeurs Actuelles et signée par, notamment, une vingtaine de généraux à la retraite qui « évoquent un délitement de la France », suscitant de nombreuses réactions et polémiques :
La tribune des « Généraux par Etienne Copel.
En France, la liberté d’expression est la règle. Les exceptions sont heureusement rarissimes. C’est ainsi qu’il est interdit par la loi de nier la Shoah. Mais ceux qui ont trainé dans la boue le Président Macron lorsqu’il a reconnu les horreurs de la colonisation de l’Algérie au 19e siècle avaient tout à fait le droit de le faire. Et pourtant l’ampleur des massacres de femmes et d’enfants pendant cette sinistre période n’est pas contestable : elle est en particulier décrite avec précision par les courriers personnels que les militaires engagés échangeaient alors entre eux.
La tribune publiée par l’hebdomadaire Valeurs Actuelles et signée par « une vingtaine de généraux, une centaine de hauts gradés et plus d’un millier d’autres militaires » soulève un tollé dans l’univers politique qui réjouit sûrement les signataires. Le président Macron a répondu d’abord par le silence à ce texte médiocre et il a bien fait. Tiendra-t-il longtemps ? Pas sûr !
Cette tribune très pessimiste, qui voit la France se déliter et prévoit des insurrections si le gouvernement ne réagit pas, ne peut conduire ses auteurs à être sanctionnés devant un tribunal civil. Les juges ne manqueraient pas de signaler par exemple que prévoir un risque d’insurrection n’est pas un appel à la sédition.
En raison du fameux devoir de réserve, la question se pose en termes quelque peu distincts pour les différentes catégories de militaires ayant signé le texte controversé. Le devoir de réserve est – un peu- précisé par l‘article L.4121-2 du Code de la défense qui indique : « les opinions ou croyances, notamment philosophiques, religieuses ou politiques, sont libres », mais ne peuvent être exprimées « qu’en dehors du service et avec la réserve exigée par l’état militaire ».
Dans ces conditions un militaire à la retraite s’applique généralement sa propre interprétation du devoir de réserve et s’abstient par exemple de propos injurieux. Mais comme tous les Français il ne peut être sanctionné que par un tribunal civil. L’armée n’a plus aucun pouvoir contre lui. A l’inverse, un militaire en activité peut être sanctionné par l’autorité militaire pour des prises de position jugées non conformes au devoir de réserve. C’est ainsi que le général de Bollardière a été sanctionné de trente jours d’arrêts de forteresse pour avoir courageusement pris position contre la torture pendant la guerre d’Algérie. Au dire de Florence Parly, ministre de la Défense, les signataires en activité de la tribune de Valeurs actuelles seront sanctionnés. A quel niveau ? Probablement des arrêts simples ou de rigueur sans conséquences pour leur solde.
Reste le cas particulier des officiers généraux en « deuxième section ». Au moment où ils quittent le service actif les généraux ne sont pas mis à la retraite mais versés dans une section à part qui les rend disponibles pour un éventuel rappel en activité et leur procure certains avantages comme une réduction sur les voyages SNCF. Pour tous les généraux qui ne sont plus en service actif, la sanction naturelle est la mise à la retraite …. qui leur supprime ces menus avantages. Cette sanction sera-t-elle appliquée en l’occurrence par Florence Parly ? C’est probable sinon souhaitable. Même quand on ne pense aucun bien du texte incriminé on peut trouver que l’important demeure le respect le plus large possible de la liberté d’expression.
#etiennecopel, #valeursactuelles, #macron, #parly, #généraux, #armée
Soyez le premier à commenter