Le traité de non-prolifération, un lointain souvenir

© Chappatte dans Le Temps, Suisse

Les Etats dotés de l’arme nucléaire continuent à renouveler leur arsenal, tandis que les Etats non-dotés comprennent de moins en moins pourquoi ils respecteraient un traité devenu inégal. 

Le traité de non-prolifération nucléaire (TNP) repose sur l’équilibre entre les engagements des Etats dotés de l’armement nucléaire (EDAN) et les autres. En signant le traité, les « non dotés » s’engagent à ne pas développer d’armes nucléaires, en contrepartie les « dotés », aux termes de l’article VI, «  s’engagent à poursuivre de bonne foi des négociations vers le désarmement nucléaire dans le cadre d’un désarmement nucléaire général et complet ».

Que voit-on en pratique ? Les Etats dotés demandent toujours plus de contrôles chez la plupart des « non dotés ». Mais il y a des exceptions. Israël n’est jamais contrôlé. Ce qui n’empêche pas ses dirigeants de réclamer toujours plus de sanctions contre l’Iran soupçonné, sans preuve, de chercher à développer un arsenal nucléaire malgré des contrôles multiples. Et puis l’on voit surtout que les Etats dotés non seulement ne font rien pour entamer des négociations pour le désarmement nucléaire, mais renforcent sans cesse leur arsenal. Le cynisme des Américains en la matière est particulièrement frappant.

Renouvellement de l’arsenal

Le Congressional Budget Office a publié une étude, le 31 octobre, montrant que les plans nucléaires vont coûter… 1200 milliards de dollars au cours des trente prochaines années. Que vont faire les Américains avec des sommes aussi gigantesques ?

Ils vont tout remplacer, tout moderniser : 12 nouveaux sous-marins lance-missiles de la Columbia Class vont se substituer à ceux de la Ohio Class, les missiles sol-sol du « Ground Based Strategic Deterrent » vont prendre la place des Minuteman III intercontinentaux, de nouveaux bombardiers B-21 à long rayon d’action vont être mis en service ainsi que des missiles de croisière de très grande portée, avec bien sûr de nouvelles têtes nucléaires.

Pourquoi toutes ces bombes ? Pourquoi tous ces missiles ? Pour faire face à qui ? Pas de réponse claire. Pas d’études précises. Il faut faire plus. Toujours plus. C’est la tradition… et c’est le souhait des industriels.

Les Américains ont-ils les moyens de dépenser autant ? Certains économistes en doutent. Cela serait d’ailleurs assez indifférent si, avec ce programme démesuré, les Américains ne donnaient pas un très mauvais exemple aux autres Etats dotés et ne leur fournissaient pas des raisons supplémentaires de développer leurs propres programmes disproportionnés. Comme si l’arrivée sur la scène nucléaire de la Corée du Nord ne leur donnait pas assez d’arguments !

Arguments fallacieux au demeurant tant la disproportion des forces en présence est immense. Pour dissuader Kim Jung Un d’utiliser ses armes nucléaires, le centième des armes des grandes puissances nucléaires serait largement suffisant. D’ailleurs, il n’a certainement aucune intention de le faire ; il veut simplement se mettre à l’abri d’une attaque classique, sachant que, comme disait le général de Gaulle, « il est toujours plus difficile d’attaquer un pays nucléaire qu’un pays qui ne l’est pas ».

Pendant ce temps, le TNP se place de plus en plus en tête de la longue, très longue, liste des « traités inégaux ».

Général Etienne Copel

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